La guerre de Franci
Franci Rabinek Epstein, Flammarion, 2021, 277 p. - 21 €
À travers ses mémoires que sa fille, Helen Epstein, auteure réputée pour son travail sur le traumatisme en héritage, a réussi à faire publier après sa mort, Franci Rabinek Epstein, jeune juive Tchèque déportée à l’été 1942 successivement dans les trois camps de concentration de Theresienstadt, Auschwitz et Bergen Belsen, relate son histoire et l’effroyable combat contre la mort qu’elle a mené aux côtés d’autres détenues. Il existe de nombreux récits de rescapés des camps mais le témoignage de Franci a cela de singulier qu’il nous donne à voir le quotidien des femmes. Dans l’enfer qu’elles subissent, pour résister aux violences des kapos, à l’absurdité des ordres hurlés, aux coups et aux humiliations, des amitiés et des solidarités d’une solidité à toute épreuve se tissent entre elles, et parfois même, des amours fugaces mais non moins intenses, de furtives relations sexuelles, avec des hommes, prisonniers croisés au détour des baraquements s’accrochant comme elles à cette fragile étincelle de vie au sein du néant. Par-delà la mort qui rôde et emporte chaque jour son lot d’êtres humains brisés par la faim, le froid, la maladie et l’épuisement, par-delà les abominables fours crématoires, des femmes de la trempe de Franci ont su résister en opposant au mal une indéfectible foi en la vie plus forte que tout. Un récit aussi puissant que bouleversant.
Cécilia Dutter