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Paul Doumer -La République audacieuse

Amaury Lorain, éd. Champ Vallon, 2021, 416 p. – 27 €

Notre association des Écrivains combattants a une dette morale vis-à-vis de Paul Doumer, puisque c’est en inaugurant, en sa qualité de Président de la République, notre Après-midi du Livre, le 6 mai 1932, à l’hôtel Salomon de Rothschild, à Paris, qu’il a été mortellement blessé par un Russe exalté, Pavel Gorgulov. Encore que l’enquête montrera que Doumer, très mal soigné, aurait pu être sauvé…

C’est donc avec un très grand intérêt que nous avons pris connaissance de la biographie Paul Doumer - La République audacieuse, publiée, en décembre dernier, par Amaury Lorain, docteur en histoire de l’Institut d’études politiques de Paris, spécialisé dans l’histoire coloniale française. L’auteur n’en est pas à son coup d’essai sur cet homme politique, puisqu’il avait déjà publié un Paul Doumer, gouverneur général de l’Indochine, qui lui avait valu, en 2006, le Prix des Écrivains combattants (fondation Marcel Pollitzer), décerné par l’A.E.C.

Au-delà des circonstances de sa mort, le parcours de Paul Doumer mérite, en effet, d’être mieux connu, et l’auteur, s’appuyant notamment sur de nombreuses archives privées communiquées par sa famille, l’expose clairement, tout au long des douze chapitres regroupés en trois parties chronologiques (Les ferments de l’ambition 1857-1896 ; Un cursus honorum mené d’arrache-pied 1897-1918 ; Des années folles aux années sombres 1919-1932). Né à Aurillac en 1857, fils de cheminot, le jeune Paul, contraint de travailler, comme coursier, dès l’âge de douze ans, s’est réellement « fait lui-même », passant des diplômes, devenant journaliste, adhérent à la Maçonnerie, entrant en politique, élu député de l’Aisne, dès 1888, devançant le général Boulanger. Partisan de l’Empire colonial français, Doumer sera, de 1897 à 1902, Gouverneur général de l’Indochine française (qu’il contribuera puissamment à organiser), puis occupera plusieurs postes ministériels (dont celui des Finances) et la présidence de la Chambre des députés. Père de huit enfants, Doumer perdra, durant la Grande Guerre, quatre de ses cinq fils, et une fille, morte de chagrin en 1917. Il se montrera intransigeant vis-à-vis du paiement des réparations allemandes. Président du Sénat en 1927, cet homme d’aspect digne, portant barbe blanche,  à la vie privée irréprochable, sera élu Président de la République en 1931, devançant Aristide Briand. Un cursus honorum long de près de cinquante ans, tout à fait exceptionnel, sans doute mal connu, la mémoire collective ayant surtout retenu sa disparition brutale, dans l’application de ses fonctions présidentielles, en mai 1932, à l’âge de 75 ans. Un décès très vivement ressenti par les Français de l’époque, comme en témoignent les nombreuses voies publiques ayant reçu l’appellation de « Paul Doumer ».

Didier Béoutis